Stéphane Bérard, Mille plateaux-repas

Stéphane Bérard, Mille plateaux-repas, 2011

Trois tables de pique-nique en bois de mélèze, plateaux-repas plastique, ciment.

Lieu-dit Lou Passevous, Le Vernet, route D 900a
Coordonnées gps : nord 44° 16′ 57,86 » / est 6° 23′ 26,81 »

 

Dans un environnement montagnard, trois tables de pique-nique invitantes sont placées près d’un complexe touristique des années 80 en restructuration. Or, elles sont intentionnellement placées sur la pente du terrain ce qui, à priori, les rend impraticables et incohérentes. Pour ceux qui, pourtant, s’y aventurent, elles sont facétieusement inconfortables. Bien sûr, le touriste y fera l’expérience physique de la déclivité, il appréciera peut-être autrement le point de vue imprenable, de surplomb et de biais, il ressentira en son corps même les effets de la tectonique des Alpes de Haute-Provence. Puis, il sera sans doute conduit à réinterroger les us et coutumes touristiques pour mesurer, enfin, l’absurdité de manger à table en montagne !

Le titre de l’œuvre, Mille plateaux-repas, fait un clin amusé à Deleuze et Gattari qui ont conçu la lecture de leur livre philosophique dans la pluralité de strates dont chacun des chapitres est une œuvre en soi.

L’artiste pousse l’humour à son comble lorsqu’il prévoit d’assortir le dispositif de plateaux-repas avec cales pour compenser l’angle de la pente !
Ce qui semble naturel ne l’est plus exactement, ce qui va de soi est déstabilisant ; pour nous libérer d’un certain nombre d’acquis, l’artiste opère, assez simplement, en un léger dénivelé.

 

« Initialement proposé « Première pierre du pilier autoroutier liaison Digne-les-Bains/ Caraglio » comprenant la « simple » installation d’un plot (demi-cube de béton d’environ 1m par 1m et haut de 50cm) ancré sur l’un des nombreux dégagement qui sinue entre les gorges profondes et pittoresques qui relient Digne et le village de Barles par la RD 900A en un magnifique écrin de verdure et de roches contournant en sillon un massif préservé et sauvage, celui du Blayeul. Initiant donc imaginairement des développements possibles de constructions et de saccages à courts, moyens et longs termes de ces vallées. Ce projet ne fut pas retenu, néanmoins Nadine Gomez me demanda de réfléchir à un nouveau projet ; celui installé au Vernet depuis 2012. Qu’elle en soit ici vivement remerciée. »

 

Originaire de Haute-Provence, Stéphane Bérard développe une démarche par l’invention comme mode opératoire critique et, humoristique. Il recourt à tous les mediums intéressant son projet, sans nécessairement se plier à une méthodologie, de sorte que les circonstances et l’imprévisible entrent facilement en scène.

Stéphane Bérard s’amuse de la critique appliquée à l’art en général ; le langage et les jeux de mots l’aident à opérer des perturbations sémantiques. De même, visuellement, ses œuvres, installations, films, performances, concerts… créent, l’air de rien, des décalages amusés avec la réalité et la norme artistique qui se prend un peu trop au sérieux, à son goût. L’économie de moyens, la relative simplicité et la fantaisie singularisent cette démarche artistique qui s’en réfère, encore par humour, à Léonard de Vinci !