herman de vries, le sanctuaire de la nature et son bois sacré, 1999-2003
lances en fer forgé à la pointe dorée et barrière en fer
Roche-Rousse, Vallée du Bès.
commande publique de l’État en 2001.
L’artiste appréhende l’idée de sanctuaire comme espace déterminé, circonscrit et protégé à la double acception : lieu sacré et réserve naturelle. Après la réalisation de deux autres sanctuarium (Stuttgart, 1993 ; Münster, 1997), herman et suzanne de vries mûrissent l’idée d’en réaliser un dans les environs de Digne, où demeurent de nombreux habitats abandonnés. Ils décident de l’implanter autour d’une ruine de Roche-Rousse, lieu où la falaise de calcaire gris se patine d’orangé. Les ruines sont ici le pivot du projet. Dans la pensée bouddhiste, elles évoquent la contingence du monde, l’impermanence des choses en dépit de la présence humaine. En ses quatre entrées, le sanctuaire de la nature est délimité par une lance en fer à la pointe dorée sur lesquelles le mot silence est gravé pour indiquer le respect le plus total exigé à l’égard des espèces qui y vivent. Autour de la ruine, une clôture aux pointes dorées impose une distance signifiant l’interdiction de pénétrer le lieu sacré. Elle assure la préservation du lieu de toutes infractions humaines. Pour y accéder, il faut monter à pied à 1 400 mètres d’altitude. Cette ascension participe à l’esprit de l’œuvre, au processus de réflexion et de méditation qui la définit. Sur le sentier d’accès, un bloc éboulé est gravé de la citation du philosophe mathématicien Gassendi, né près de Digne en 1592, « ambulo ergo sum » (je marche donc je suis). Il appuie l’idée que la marche définit l’être au monde. Le sanctuaire d’herman de vries n’est pas une œuvre dans la nature, mais la désignation d’un espace préservé de toute intervention humaine, voué à son propre développement dans le temps. Il vise à re-naturaliser l’humain, c’est à dire à lui interdire une utilisation de la nature assujettie, mercantile ou esthétique. Il veut insuffler l’idée qu’elle doit être reconsidérée pour ce qu’elle est : « notre réalité première ».